Leonor BARATA
“Je suis comédienne et créatrice artistique.
J’habite au Portugal – dans une petite ville – Viseu.
Je devais présenter mon spectacle “Ulysse” ce printemps à Méli’môme mais finalement je ne suis pas sortie de chez moi.”

 

Cher Ulysse,

Je vous écris d’un pays que vous ne connaissez pas.

Et vous ne me connaissez pas non plus, mais moi je vous connais et je persiste à raconter vos aventures.

Votre voyage et cette tentative incessante de revenir à la maison m’ont toujours semblé une puissante métaphore.

Aujourd’hui, en mai de l’année 2020, plus encore.

Je suis chez moi, dans mon Ithaque, moi aussi assiégée et comme Pénélope dans l’attente d’un retour. Un retour à une normalité qui, nous le savons déjà, devra être reconstruite.

Je me souviens de vous, combattant dans une guerre de 10 ans. Je me souviens de vos camarades morts de faim et de la peste pendant qu’ils attendaient. Je me souviens de tant de batailles. Je me souviens aussi de la solution trouvée – le Cheval de Troie – là, d’où je vous écris, ce cheval est un virus invasif qui nous tue de l’intérieur et nous oblige à nous refermer.

Dans cette lutte que l’on entreprend aujourd’hui, chacun sera à tour de rôle Pénélope et Ulysse. Chacun de nous attend et revient à son tour et parfois dans la même journée.

Je vous écris en, somme, pour vous dire que si je croyais comme vous à une quelconque divinité (Athéna ou Arès), peut-être trouverais-je un sens à ces jours.

Je vous écris pour vous dire que, en fin de compte, tant d’années après, nous nous posons la même question :
Comment faire ce voyage sans perdre la foi dans des retrouvailles heureuses ?

Leonor Barata

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