Isabelle MOLLARD est professeure de français et de théâtre au Lycée Paul CLAUDEL de LAON. Elle est partie prenante du Salon du Livre à MERLIEUX, c’est une grande lectrice.
Elle est membre du Conseil d’Administration de NOVA VILLA.

 

Dimanche 12 avril 2020

Maman,

Pâques 2020 : première fête de Pâques sans toi, maman…
Chaque “première fois sans toi” me rappelle la “dernière fois avec toi”.

L’an dernier encore, tu organisais la chasse aux œufs dans le jardin pour tes petits-enfants.
L’an dernier, avec bonheur, tu m’envoyais des photos des petits paniers remplis de chocolats et des fleurs printanières qui coloraient le jardin.

Depuis vingt ans, j’étais présente parmi vous sans être avec vous pour Pâques, à travers des cartes, des messages, des photos, des appels téléphoniques.
Et cette année, papa est seul, vraiment seul, isolé par ce confinement de sa famille, sans réconfort. Aujourd’hui mon cœur est lourd de tristesse.

Tu aimais être entourée, régner sur ton petit monde (avec une autorité parfois envahissante).
Tu aimais réunir famille et amis pour un apéro improvisé ou un bon repas. Tu avais à cœur alors de cuisiner de bons petits plats, en quantité le plus souvent, par peur de manquer.
Tu aimais partager rires et jeux.
Tout ce qui n’est plus possible en ce moment…

Depuis le début de cette épidémie, je me demande : que se passerait-il si tu étais encore là ? Si tu étais encore là avec ta maladie, qui avait affaibli tes défenses immunitaires ?

Nous avions pris l’habitude des gestes barrières depuis l’annonce de ta maladie : nous laver les mains régulièrement, les passer au gel hydroalcoolique avant d’entrer dans ta chambre stérile, éviter tout contact avec toi, ne plus t’embrasser… Tous les messages de prévention que nous entendons aujourd’hui me ramènent vers toi, vers ces mois de maladie que tu as surmontés avec force et espérance.

Mais tu nous as quittés en octobre dernier. Nous avons pu t’accompagner jusqu’au bout, nous rassembler et fleurir ta tombe, nous serrer dans les bras, être soutenus par la présence de ceux qui t’aimaient et y trouver un peu de réconfort à notre peine. Aujourd’hui, j’ai une pensée émue pour tous ceux qui perdent un être cher, sans pouvoir lui tenir la main, sans pouvoir lui rendre un dernier hommage collectif, sans pouvoir être entourés… Seulement des mots et des regards échangés, avec chaleur et intensité.

Cette période de vacance que nous vivons aujourd’hui est remplie de ton absence. Seule chez moi, je pense si souvent à toi… Rangeant mon bureau ces jours-ci, j’ai pris le temps de feuilleter les albums photos, de relire les cartes et courriers que tu m’as régulièrement envoyés, à chaque anniversaire, à chaque fête, à chaque événement familial ou amical auquel la distance m’empêchait de participer… Retrouver ces traces de toi m’a fait pleurer, m’a fait sourire, m’a fait du bien aussi.

Avoir accompli cette mystérieuse mission que de t’avoir accompagnée, maman, vers là où l’on nous attend un jour m’a fait grandir, m’a ouvert un nouveau chemin vers toi ! Et ce chemin est empreint de beaux souvenirs et de profonds espoirs, comme autant de petits cailloux que tu as semés… pour nous, pour “après”.

Je pense très fort à toi, maman…

Isabelle Mollard

 

 

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